Les associations affiliées à la fédération internationale des Petits Frères des Pauvres s’engagent à rompre la solitude des aînés et à les accompagner dignement jusqu’à la fin de leur vie, où qu’ils vivent. Cela peut être à leur domicile privé, en maison de retraite, à l’hôpital, mais aussi, on y pense moins souvent, en prison. En effet les personnes âgées détenues sont largement touchées par la solitude en prison : enfermées, limitées dans leurs contacts avec l’extérieur, bénéficiant de peu d’activités… Elles souffrent d’une double peine.
C’est pourquoi l’association française des Petits Frères des Pauvres a démarré une action dans le milieu carcéral en 2012 et qu’elle accompagne aujourd’hui des personnes âgées détenues et notamment celles qui sont en hôpital carcéral.
« À l’isolement lié au lieu d’enfermement s’ajoute la rupture des liens familiaux et sociaux, les problèmes financiers, la perte d’un travail, d’un logement … et si en plus les personnes détenues sont âgées, malades quelques fois avec un « pronostic vital engagé », elles doivent supporter une multitude de peines. », explique Anne Legge, coordinatrice au sein de l’association.
Pour l’association, accompagner dignement ces détenus en fin de vie est essentiel. Comme les bénévoles en témoignent, ils sont là pour apporter une écoute neutre : « Lors de ces rencontres hors du commun il est essentiel de voir la personne pour ce qu’elle est dans son humanité sans juger son acte délictuel ou criminel. Nous allons vers « un autre que soi« , c’est-à-dire, une femme ou un homme quelles que soient les erreurs commises. Au-delà du crime ou du délit commis, la rencontre est avant tout une rencontre interhumaine », explique Anne Legge, coordinatrice de l’équipe accompagnement des personnes malades et en fin de vie qui intervient dans le milieu carcéral à Paris.
Les visites des bénévoles sont d’ailleurs une bouffée d’air frais pour les détenus qui sont souvent très seuls, un moyen de trouver une écoute attentive et un réconfort dans leur quotidien.
Aux Etats-Unis, l’équipe LBFE de Cincinnati a également eu l’occasion d’accompagner un détenu pendant plusieurs années et ce jusqu’à la fin de sa vie. En effet, Yogi Wess, responsable de l’association, a entretenu une forte relation avec Mr Gay, surnommé « Grand-père Gay » à la prison gériatrique de l’Ohio. Les visites mensuelles à Mr Gay se sont rapidement transformées en réelle amitié, une amitié bientôt étendue à la famille de Yogi, qui se mit également à rendre visite à l’aîné.
« Nos visites étaient toujours très animées et Mr Gay s’y préparait avec beaucoup d’attention -toujours rasé de près, un uniforme fraîchement repassé, toujours le sourire en entrant dans la salle des visites et prêt à déguster les hamburgers, les barres de céréales, et les beignets en poudre qu’il achetait dans les distributeurs automatiques. Mr Gay aimait jouer aux cartes, parler de sport, des dernières technologies, il était toujours curieux et s’intéressait à LBFE, à ce que Lucy étudiait à l’école et s’inquiétait de savoir si notre chien Bojangles allait bien. Il était toujours positif. » Yogi Wess
Dans la commémoration écrite et lue par Yogi Wess à l’enterrement de Mr Gay, elle dépeint un détenu certes, mais également un homme, avec des rêves et des envies.
« Son rêve était une vie où il avait sa propre chambre, où il pouvait éteindre la lumière et dormir dans le noir et le silence, où il aurait un placard rempli de costumes venant d’un magasin pour gentlemen et une église dans laquelle porter ces costumes qui serait l’église St. Clare. Il rêvait d’aller au bowling avec Lucy et ses amies, décider de ce qu’il avait envie de manger, cuisiner, aller à New York pour participer à un festival de jazz ou à la Nouvelle Orléans pendant Mardi Gras. »
Jusqu’à sa mort en 2017, Yogi Wess et sa famille ont rendu visite à cet homme emprisonné à vie, qui n’avait plus connu la liberté depuis 1975 et qui ne l’a jamais retrouvé.
L’accompagnement des personnes âgées détenues et malades reste peu développé et assez méconnu mais est pourtant essentiel pour rompre la solitude et l’isolement dont elles souffrent en prison ; elles ne doivent pas être laissées de côté.
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Crédit photo : LBFE Cincinnati