Liberté d’aller et venir en EHPAD : le témoignage des Petits Frères des Pauvres en France

Soucieuse de se faire le porte-voix des personnes accompagnées en EHPAD et des bénévoles qui les accompagnent, l’association française des Petits Frères des Pauvres a souhaité recueillir leur parole et témoigner de leur vécu dans cette période si particulière. Les données collectées et un certain nombre de propositions ont été adressées à la Ministre déléguée à l’Autonomie, dans le cadre d’un séminaire de travail sur la liberté d’aller et de venir en EHPAD.

Depuis le confinement en mars dernier, certains EHPAD ne se sont jamais vraiment déconfinés, d’autres ont refermé leurs portes en septembre. Si la presse en témoigne régulièrement, l’association a estimé nécessaire de recueillir la parole des équipes de terrain pour connaître leurs points de vue et la réalité des situations qu’ils rencontrent. Le questionnaire a permis de recueillir 76 témoignages qui concernent 205 EHPAD.

Ils constatent d’abord que la situation sanitaire a conduit les personnes âgées résidant en EHPAD à abandonner leurs projets de vacances (63%). Dans la majorité des cas, ce sont les EHPAD qui ont refusé tout départ en séjour (34%), les ont limités à une sortie à la journée ou ont imposé un isolement en chambre pendant quatorze jours au retour (8%), ce qui a eu un effet dissuasif sur les résidents. Parfois, ce sont les équipes elles-mêmes qui ont estimé préférable de ne pas proposer de séjour cette année.

A la question « Avez-vous remarqué des changements chez les personnes accompagnées en lien avec la période de confinement de mars à mai 2020 ? », les bénévoles ont répondu :

Toutefois, à la question « comment se passent vos visites en établissements depuis juin 2020 ? », la réponse est « assez bien » dans 47% des EHPAD concernés. Les liens sont maintenus autant que possible, par téléphone principalement, même si quelques visites -très encadrées – peuvent avoir lieu.

A ce jour, 135 des 205 EHPAD concernés par le questionnaire ont décidé de reconfiner les résidents. Plusieurs établissements invoquent le principe de précaution et bien souvent les bénévoles ignorent la durée de cette fermeture.

Les paroles de personnes accompagnées par l’association

  • « Il faut bien mourir de quelque chose. »
  • « C’est d’isolement que je vais mourir. »
  • « Je vais m’éteindre si cela continue trop longtemps. Ne plus parler avec les bénévoles, cela me rend triste, être dans sa chambre, ne plus voir ma voisine de chambre, ne plus manger dans le réfectoire, c’est trop dur.»
  • « Si je n’avais pas ma religion, je me suiciderais… »
  • « Je m’en moque de mourir, tout ce que je veux c’est pouvoir discuter avec mes copines »
  • « C’est trop long et trop triste »
  • « Je voudrais sortir et revenir à un logement où j’ai ma liberté »
  • « Avant le COVID je me sentais seule, aujourd’hui, je comprends vraiment la solitude, la vraie »

Les alertes faites par les bénévoles

« Dans un service plusieurs personnes ont été testées négatives car elles avaient été en contact avec une aide -soignante testée positive. Elles sont restées 7 jours dans leur chambre et testées à nouveau et toujours négatives »

  • « Elles sont mises devant le fait accompli et souffrent de ne pouvoir participer aux temps collectifs »
  • « Beaucoup de résidents se sont sentis privés de liberté, en prison, déchus de leurs droits. »
  • « Pour certains résidents, nous sommes le seul lien avec l’extérieur, nous essayons par téléphone de les faire rire, faire des jeux et les rassurer surtout.»
  • « J’accompagne un monsieur qui ne peut plus s’exprimer verbalement. Avant le confinement j’avais mis un certain temps à créer un lien de confiance. Il était devenu très attentif à mes propositions (écoute de chansons, livres illustrés que je lui lisais…). Après des semaines d’absence, je constate qu’il est plus dans le refus qu’avant. A-t-il éprouvé un sentiment d’abandon ? C’est possible… »

 

L’association souhaite rappeler que les EPHAD  sont des lieux de vie et que toute restriction de liberté doit être proportionnée. Aussi, les Petits Frères des Pauvres s’opposent aux décisions de fermeture d’EHPAD à titre préventif (sans cas suspect de Covid19).

Les propositions des Petits Frères des Pauvres à la ministre déléguée à l’Autonomie :

  • Permettre aux personnes âgées d’exprimer leurs préférences et leurs choix
    • Et notamment : Rendre obligatoire une réunion d’information à l’attention de tous les résidents, recueillir leurs questions, craintes…
  • Permettre à l’entourage de rester en lien avec leur proche âgé dans un dialogue continu avec l’établissement
  • Reconnaitre les bénévoles d’accompagnement comme des personnes significatives
    • Et notamment : Ne pas restreindre les visites seulement aux familles
  • Favoriser au maximum la circulation des personnes âgées en mettant en place des moyens de détection rapide du virus
  • Maintenir une vie collective à l’intérieur de l’EHPAD
  • Garantir le respect des droits des usagers

Retrouvez ici les résultats de l’enquête et le détail des propositions des Petits Frères des Pauvres à la ministre déléguée à l’Autonomie.  Liberté d’aller et venir en EHPAD enquête et proposition

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