Depuis 2021, la Fédération Internationale a un nouveau partenaire, basé en Grèce : l’Institut Prolepsis. Depuis 2019, l’Institut développe un projet dédié aux personnes âgées isolées intitulé Friendship at Any Age (Amitié à Tout Age). Eleni Fagogeni, manager du programme, nous raconte…
Eleni, pouvez-vous nous dire ce qu’est l’Institut Prolepsis et en quoi consiste le programme Friendship at Any Age ?
L’Institut Prolepsis a été créé en 1990 à Athènes, en Grèce. Sa mission est de répondre aux principaux besoins de santé publique de la Grèce et de l’Europe en menant des recherches académiques rigoureuses et en les traduisant en projets éducatifs, de plaidoyer et humanitaires. Cette mission est ancrée dans la conviction que l’égalité en matière de santé est une condition préalable nécessaire à une justice sociale plus large et à l’inclusion sociale.
L’Institut conçoit et met en œuvre des initiatives, tant au niveau national qu’européen, visant à :
- mener des recherches sur des questions importantes liées à la santé et au bien-être, en mettant l’accent sur l’épidémiologie et la médecine préventive,
- promouvoir l’éducation et la sensibilisation à la santé,
- offrir un soutien et des services humanitaires aux populations vulnérables,
- créer des réseaux de coopération interdisciplinaire et internationale sur les questions de santé publique.
En 2019, l’Institut Prolepsis a créé le programme Friendship at Any Age, une initiative globale qui repose sur le bénévolat. Il soutient les adultes de plus de 65 ans, et vise à combattre la solitude et l’isolement social par le contact social et l’amitié. De cette manière, il renforce le rôle social et la confiance en soi des personnes âgées. Parallèlement, l’objectif du programme est de mettre en lumière les besoins et les défis des personnes âgées et de sensibiliser le public, les organismes concernés et l’État.
Pourquoi l’Institut Prolepsis a-t-il décidé de s’attaquer à l’isolement social et à la solitude des personnes âgées en Grèce ? Beaucoup de gens pensent que ce problème n’existe pas en Grèce en raison de l’importance des liens familiaux…
Bien que les liens familiaux soient encore forts en Grèce, 22,3% de la population a plus de 65 ans. La population de notre pays ne vieillit pas seulement, mais elle s’isole aussi. On estime que 730 000 personnes âgées vivent seules. Les personnes âgées connaissent la solitude et l’isolement social alors que, dans le même temps, leur expérience et leurs capacités ne sont pas mises en valeur. Outre la dégradation de la qualité de vie, l’isolement social et la solitude ont des effets néfastes sur la santé physique et mentale de chacun. Lorsque l’Institut Prolepsis a pris conscience de la mesure de ce phénomène en Grèce, il est apparu évident qu’il fallait sensibiliser la population à cette problématique et proposer des solutions concrètes, d’où la création de notre programme.
Où en est le programme Friendship at Any Age aujourd’hui ?
Le programme a été lancé en décembre 2019, dans la région de l’Attique, et depuis mars 2021, il s’étend à toute la Grèce.
Aujourd’hui, le programme comprend deux axes :
- La mise en relation des personnes âgées et des bénévoles. En particulier, les bénévoles entrent en contact avec les aînés localement (où et quand cela est possible), avec pour objectif de développer des liens d’amitié. Chaque bénévole communique avec les bénéficiaires âgés par téléphone sur une base hebdomadaire (et/ou effectue des visites à domicile, si cela est possible, en raison de la pandémie). De cette manière, les bénévoles donnent aux bénéficiaires le sentiment d’appartenir à une communauté qui se soucie d’eux, tout en les stimulant intellectuellement et émotionnellement. En retour, les bénévoles apprécient de pouvoir être des citoyens actifs et contribuer à la société, tout en bénéficiant de l’expérience des personnes âgées.
- Une ligne d’assistance téléphonique pour lutter contre la solitude des personnes âgées (0030 210-6101300). Elle est à la disposition des personnes âgées qui se sentent seules, ainsi que de leurs soignants, amis et parents. Elle fonctionne du lundi au vendredi, de 11 h à 20 h, et permet de communiquer dans un environnement sûr avec des bénévoles dûment formés. Si nécessaire, des informations sont fournies sur les services sociaux pertinents. Les appels ne sont pas enregistrés, et l’Institut Prolepsis ne conserve ni ne traite de données personnelles.
Depuis la création du programme, 195 aînés ont été mis en relation avec plus de 200 bénévoles et 2865 appels ont été passés sur la ligne d’assistance téléphonique.
Quel a été l’impact de la pandémie de Covid sur votre programme et sur les personnes âgées en Grèce ? Pensez-vous qu’elle puisse contribuer à sensibiliser au problème de l’isolement social ?
La pandémie a eu un effet sur les routines des personnes âgées, les soins et le soutien qu’elles recevaient, leur capacité à rester en lien et la façon dont elles étaient perçues. Les personnes âgées ont été confrontées à l’obligation de passer plus de temps chez elles, au manque de contacts physiques avec les autres membres de la famille, les amis , ainsi qu’à l’anxiété et à la peur de la maladie et de la mort – la leur et celle des autres (OMS, 2021). La pandémie a été à la fois un obstacle et une opportunité pour la mise en œuvre de notre programme qui était encore récent. Davantage de personnes ont pris conscience du problème de la solitude et de l’isolement social et ont voulu s’impliquer pour aider les personnes âgées à se sentir à nouveau partie prenante de la société. Les visites à domicile ont été remplacées par des appels téléphoniques fréquents et, dans ce cadre, davantage de bénévoles ont souhaité participer.
De quoi êtes-vous le plus fier ?
Nous sommes surtout fiers de nos « aînés bénévoles ». L’idée principale était de faire en sorte que les personnes âgées se sentent utiles et actives. Dès le début, nous les avons donc considérées comme des mentors et nous les avons donc mises en relation avec des bénévoles en fonction de leurs intérêts mutuels, comme leur expérience professionnelle. Cette approche a été couronnée de succès, mais les personnes âgées nous ont dit qu’elles avaient aussi besoin de liens avec des personnes de leur âge. C’est alors qu’est venue l’idée de mettre les aînés en contact les uns avec les autres. De cette manière, ils se sont faits de nouveaux amis et sont devenus eux-mêmes bénévoles. Aujourd’hui, chaque aîné est relié à deux bénévoles et à un troisième ami pour lequel il est lui-même bénévole. Ils ont ainsi le sentiment de rendre à la communauté ce qu’elle leur a donné et ils sont vraiment fiers de ce qu’ils offrent.
Quels sont les principaux défis pour l’avenir ?
Notre principal défi pour l’avenir est de créer des équipes locales de bénévoles et de bénéficiaires. Pour l’instant, le programme est géré de manière centralisée par des salariés et la création d’équipes locales nous aidera à diffuser le programme et à mettre en contact davantage d’aînés isolés avec davantage de bénévoles.
Vous travaillez en partenariat avec l’association française Petits Frères des Pauvres depuis le début, et depuis juin 2021, vous êtes également partenaire de la Fédération internationale. Quelle importance revêt pour vous le fait de travailler en lien avec d’autres organisations au niveau international ?
Nous sommes vraiment heureux et fiers d’être partenaires de l’association française et, depuis un an, de la Fédération Internationale. Comme nous sommes nouveaux dans le domaine, le fait de travailler avec d’autres organisations au niveau international et d’échanger des bonnes pratiques nous aide à nous développer et nous apporte les connaissances et le soutien dont nous avons besoin à différents niveaux.